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Nous risquons de traumatiser la société avec le changement climatique
Presque 10 ans après la catastrophe de Fukushima, le Premier ministre Japonais, Shinzo Abe, cherche à réinventer le mix énergétique de l’archipel. Donald Trump, qui a organisé la sortie des Etats-Unis de l’Accord de Paris, tâtonne pour trouver une nouvelle voie en matière environnementale. Pendant ce temps là, les yeux sont rivés sur la France qui doit offrir de nouvelles solutions politiques aux défis environnementaux durant sa présidence du G7 cette année.
Et pour cause, les enjeux sont majeurs : avec l’Accord de Paris, la communauté internationale s’est donné pour objectif de limiter le réchauffement climatique à +2°C, mais les émissions actuelles de gaz à effet de serre nous mettent sur une trajectoire toute autre. La température moyenne à la surface de la Terre devrait augmenter de 3°C. A ce niveau, le réchauffement climatique aura des effets non seulement incontrôlables mais totalement irréversibles. Cela signifie des catastrophes plus violentes et plus fréquentes à l’échelle de la planète.
Face à ces dérèglements, nous ne serons jamais égaux : les plus vulnérables payeront plus cher le coût du changement climatique. Nous ne sommes déjà pas égaux devant la nécessité de s’adapter : les plus aisés peuvent et pourront toujours mieux se protéger ou changer leurs habitudes. Une famille plus riche, ou simplement plus proche des moyens de transport, aura beaucoup moins de mal à adapter sa mobilité qu’une famille modeste. Dans l’Est de la France, les étés à plus de 55°C seront plus faciles à vivre pour les jeunes que pour les plus âgés… Mais peut-on se réjouir pour eux quand tous les systèmes de solidarité - y compris les retraites - pourraient être mis à plat par les conséquences économiques et sociales du changement climatique ? Dans l’Ouest de la France, la population, quel que soit son âge, sera frappée par des inondations ou des tempêtes plus régulières et plus dangereuses. Un grand défi émerge alors : quelle solidarité territoriale et nationale prévoir à l’échelle du pays pour faire face aux conséquences du dérèglement climatique ?
Soucieux de l’avenir des générations futures, le Y7 - le groupe d’engagement officiel du G7 envers les jeunes - réfléchit dès à présent aux idées que les chefs d’Etat et de Gouvernement des principales économies industrialisées pourraient mettre en oeuvre faire face aux défis environnementaux et ses conséquences sociales.
Agir sur les causes du risque climatique qui mettent en danger les plus vulnérables
La première étape, c’est que la France, qui préside le G7, accélère sa transition écologique par un pacte “solidarité-écologie”.
La fiscalité environnementale doit être plus équitable. Des efforts à tous les ménages - mêmes les plus modestes - sont demandés. Il est juste d’exiger autant, si ce n’est plus, des industries les plus polluantes - comme celles du transport aérien.
C’est là un point de départ essentiel mais de nombreuses autres solutions existent :
- Que l’Etat soutienne par des dotations financières plus élevées les collectivités territoriales qui s’engagent de façon concrète sur la transition énergétique (par exemple en traiter les passoires thermiques) ;
- Que la régulation des banques soit plus favorables aux institutions financières qui investissent dans l’économie bas carbone ;
- Que l’Etat soit exemplaire en élevant à 50% la part des investissements bancaires publics (CDC ou BPI) dans les investissements bas carbone.
La deuxième étape, c’est d’aller plus vite, grâce au leadership du G7, dans l’émergence d’une véritable justice climatique internationale. Les principes en sont posés dans le Pacte Mondial pour l’Environnement. Mais il faut l’exporter dans d’autres enceintes internationales comme la COP qui assurent le suivi de l’Accord de Paris.
Enfin, il faut dès aujourd’hui commencer à transformer concrètement nos modes de production et de consommation pour plus de justice écologique. Les chaînes de valeurs écologiques et équitables, en particulier dans l’agriculture, doivent être valorisées financièrement par les Etats du G7. L’agroécologie, au Nord comme au Sud, est aussi une solution pour améliorer notre résilience alimentaire et réduire notre impact carbone. La lutte contre les déchets plastiques ou la réduction de nos déchets ou de notre consommation de viande doivent aussi être des préoccupations du G7.
De façon générale, nous recommandons une pratique politique essentielle : qu’à chaque fois qu’ils légifèrent, les Parlements du G7 évaluent l’impact écologique et social des mesures qu’ils adoptent, en particulier sur les plus vulnérables.
Agir sur l’impact majeur du risque climatique sur les plus modestes
Le changement climatique aura des conséquences lourdes sur notre quotidien. Face à elles, nous ne seront pas tous égaux. C’est pourquoi nous devons dès aujourd’hui réfléchir aux mécanismes de solidarité nécessaires pour vivre ensemble dans un monde au climat déréglé.
Il est essentiel de mieux accompagner les plus modestes dans la transition écologique.
La France, par exemple, pourrait renforcer son plan d’Etat pour l'indépendance énergétique et l’accès aux énergies renouvelables qui prévoit ⅓ d’énergies renouvelables d’ici 2030. Par exemple, cela pourrait prendre la forme de prêt bancaire que les Français pourraient souscrire pour des travaux énergétiques grâce à une caution d’Etat, réduisant de fait les coûts de ces investissements durables.
Le G7 dans son ensemble doit assurer une alimentation saine, éthique et durable à ceux qui ne pourront plus se nourrir correctement à cause des dérèglements climatiques. Pour cela, il faut mettre un terme aux conséquences de la spéculation sur les denrées alimentaires, qui s'accentueront : des solutions très intéressantes proposées par l’UE et le FMI pourraient être renforcées par le G7.
Plus fondamentalement, le G7 dans son ensemble doit prendre toutes ses responsabilités face aux conséquences humanitaires du changement climatique. Le Y7 exhorte le G7 à créer un fonds mondial d’accompagnement des déplacés environnementaux, activable en cas de catastrophe climatique en plus d’un plan Marshall pour les régions vulnérables au changement climatique : le Bangladesh, par exemple, deviendra très vite un Etat failli à cause des inondations à répétition que ses habitants subiront ! Il est tout aussi urgent d'accompagner les futurs pays hôtes, souvent limitrophes, dans la construction d'infrastructures, de logements et dans l'accueil juridique des migrants climatiques.
Notre génération est préoccupée par le changement climatique et par toutes les conséquences humaines, sociales, vitales qu’il aura. C’est pourquoi, dès aujourd’hui, nous exhortons le G7 présidé en 2019 par la France à prendre des mesures fortes pour atténuer les conséquences de l’anthropocène et à mieux gérer son impact sur nos systèmes de solidarité.
Thomas Friang, Co-président du Y7 ; Charlotte Bour, Déléguée Française pour le Y7 ; Georges Rizk, Délégué Français pour le Y20