Dans sa nouvelle note d'analyse, « O Brasil voltou : Le grand dessein de Lula à l'épreuve de la polycrise », l'Institut Open Diplomacy examine le retour du Brésil sur la scène internationale sous Lula.
« O Brasil voltou » : par cette formule, le retour de Luiz Inácio Lula da Silva en 2023 proclame la réactivation d'une « politique étrangère active et ambitieuse ». Le Brésil entend retrouver son statut de puissance globale, se positionnant en « bâtisseur de ponts » et en porte-parole privilégié du Sud global. Ce « grand dessein » se heurte toutefois à la « polycrise », un enchevêtrement inédit de crises géopolitique, écologique, économique et politique qui s’alimentent mutuellement. Pour ne prendre qu’un exemple, les fragmentations politiques internes réduisent les capacités d’action de Lula sur la scène internationale. L'enjeu est de savoir si cette ambition est réaliste ou si le Brésil ne risque d'être qu'une « puissance-velléité », un État dont les ambitions diplomatiques dépassent ses capacités réelles d'action.
Pour naviguer dans ce monde polarisé, la diplomatie de Lula 3.0 mise sur le non-alignement et une « équidistance active ». Cette posture se manifeste dans les conflits majeurs : le Brésil refuse d'appliquer des sanctions contre Moscou dans la guerre en Ukraine tout en soutenant l'action de l'Afrique du Sud accusant Israël de génocide à Gaza.
Parallèlement, le Brésil réinvestit ses priorités géographiques, cherchant à relancer l'intégration sud-américaine (CELAC, Unasur) et à renforcer les BRICS+ comme plateforme de réforme de la gouvernance mondiale. Cependant, cette stratégie est plus contrainte que par le passé, et Lula fait face au paradoxe de devenir un « leader sans suiveurs » sur un continent lui-même divisé.
L'organisation successive du G20 en 2024 et de la COP 30 en 2025 a servi de test majeur pour ce leadership retrouvé. Si le G20 a permis au Brésil d'imposer avec succès ses priorités sociales (lutte contre la faim, impôt sur les ultra-riches) à l'agenda , nombre de ces ambitions sont restées au stade déclaratif lié à un agenda jugé trop vaste et dispersé. La COP 30 à Belém, censée incarner le leadership climatique brésilien , expose la contradiction fondamentale du pays : une « géopolitique du carbone-double ». Le discours « vert » de protection de l'Amazonie est contrebalancé par une politique « brune » de développement pétrolier, marquée par l'adhésion à l'OPEP+ et des projets de forage controversés en Amazonie.
En conclusion, si le Brésil est indéniablement de retour sur la scène internationale, la réussite de son grand dessein reste incertaine. Le principal risque est celui d'une diplomatie freinée par une base politique et économique interne trop fragmentée pour soutenir un agenda mondial ambitieux. Face à un Congrès polarisé et une société divisée , le défi majeur de Lula sera de trouver une continuité entre son discours international et ses actions nationales. Sans cet équilibre, le retour du Brésil pourrait être perçu comme une négligence des problèmes domestiques urgents au profit d'une ambition globale difficile à soutenir.
L’Institut Open Diplomacy, fondé en 2010 par Thomas Friang, est un think tank reconnu pour ses travaux d’intérêt général.
Attaché à la défense des intérêts des générations futures, il a crée en 2011 le Y20 et Y8 (aujourd’hui Y7), groupe d’engagement officiel de la jeunesse auprès du G20 et du G7.et forme, depuis cette date; , les délégués participant à ces sommets Y20 et Y7.
En 2025, face à l’accumulation de crises géopolitiques, écologiques, économiques et politiques qui s’aggravent mutuellement, il s’est donné pour mission de « Comprendre et combattre la polycrise ».
Dans ce contexte, le prochain Y7 organisé par l’Institut Open Diplomacy pour la France aura pour thème « Fighting the Polycrisis ».